UNESCO pubblica verità scomoda: Cernobil-AIDS (27 ottobre 2000)

Geneva Oct 2000 Unesco
http://www.unesco.org/courier/2000_10/fr/


Pripiat, Ucraina. Città completamente abbandonata a seguito dell'incidente. Che fine avranno fatto gli abitanti?
 
Biélorussie: «une catastrophe nationale» 
http://www.unesco.org/courier/2000_10/fr/planet2.htm
Propos recueillis par Galia Ackerman, journaliste à RFI.

Le 26 avril 2000, la foule défile à Minsk pour marquer l’anniversaire de la catastrophe.

Pour Vassili Nesterenko (physicien, ancien directeur de l’Institut de l’énergie nucléaire de l’Académie des sciences de Biélorussie, directeur de l’Institut indépendant Belrad), les conséquences de Tchernobyl menacent la survie du peuple biélorusse.

  Vous affirmez que le bilan de Tchernobyl est minimisé non seulement par la direction de votre pays, mais aussi par les organisations internationales...

Le Comité scientifique sur les effets des radiations nucléaires de l’ONU (UNSCEAR) s’en remet aux données de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui représente le lobby nucléaire. De plus, l’AIEA se réfère à Hiroshima et Nagasaki. Or, au Japon, la réaction thermonucléaire s’est complètement déroulée dans l’atmosphère; le sol n’a pas été contaminé. Après l’incendie de Tchernobyl au contraire, les territoires alentour ont reçu des centaines de tonnes de particules radioactives. A lui seul, le sol de la Biélorussie a absorbé 70% des radiONUcléides, dont certains, comme le césium 137, restent actifs pendant plus de 30 ans. Du coup, la lente contamination de la population passe à 80% par les produits alimentaires. Depuis la catastrophe, mon institut opère des contrôles systématiques auprès des enfants grâce à des spectromètres spéciaux. Le professeur Youri Bandajevski a été le premier à corréler l’accumulation des radionucléides dans l’organisme et les maladies des gens. La contamination est responsable de nombreuses pathologies non reconnues par les organisations internationales. 

Quelles sont ces pathologies?

En pratiquant des milliers d’autopsies, Youri Bandajevski et son équipe ont montré que le césium 137 s’accumulait dans les tissus musculaires, à commencer par le cœur: 70% des 2000 enfants contrôlés dans la zone très contaminée de Gomel souffrent de pathologies cardiaques. La concentration de césium dans les reins provoque des dysfonctionnements graves dès le bas âge. Le césium accumulé dans les muscles de l’œil déclenche des cataractes: en 1997, à Svetlovici près de Gomel, 25% des 13-15 ans étaient touchés.

Pendant la grossesse, le placenta des futures mères stocke le césium qui irradie le fœtus et à la naissance, elles nourrissent le bébé avec du lait contaminé. D’où des pathologies variées, comme le «sida de Tchernobyl», une déficience immunitaire. Enfin, l’alliance des radiONUcléides et du plomb (utilisé en 1986 pour éteindre l’incendie et retombé dans le sol) a provoqué des retards mentaux et des maladies gastro-intestinales. On va vers une catastrophe nationale.

De quoi votre pays a-t-il le plus besoin?

Deux millions de Biélorusses dont 500 000 enfants vivent dans les zones contaminées. Il faut créer des brigades mobiles pour les contrôler, eux et ce qu’ils mangent. Faute de moyens, mon institut ne le fait que très partiellement, et il est menacé de fermeture pour empêcher la circulation d’informations «dérangeantes» pour le gouvernement. Les enfants contaminés doivent être envoyés dans des régions propres au moins deux fois par an pour un mois, et traités avec des compléments nutritionnels à base de pectine. Efficaces et très peu chers, ces comprimés sont produits en Ukraine, mais pas chez nous. Il faut créer des centres pour les jeunes mères dans des régions où elles pourront manger «propre» pendant la grossesse et l’allaitement. 

Pourquoi votre gouvernement ne lance-t-il pas un cri d’alarme?

La Biélorussie est seule face à une catastrophe dont elle n’est pas responsable. Ni la Russie ni l’Ukraine, où se situe Tchernobyl, ne nous sont venues en aide. Or, notre budget national ne permet qu’une aide minime aux victimes et nos fonctionnaires ont pour devise: «après nous, le déluge». Ils ont mal évalué le problème. Ils ont menti à des dizaines de milliers de Russes venus des «points chauds» de l’ex-URSS pour s’installer dans nos zones contaminées [1]. Ils continuent à mentir à leurs propres concitoyens. C’est la politique de l’autruche, alors que seule une aide internationale massive, et un fort soutien logistique du gouvernement, permettrait la survie à long terme de mon peuple. 

1] Après l’effondrement de l’Union soviétique, 25 millions de Russes se sont retrouvés en dehors des nouvelles frontières de la Russie, notamment en Asie centrale et dans le Caucase où la guerre a fait et fait toujours rage. Le gouvernement biélorusse les a encouragés à s’installer dans des régions contaminées, en leur octroyant logement, travail et statut de résident.

Chernobyl: the political fall-out continues
Interview by Galia Ackerman of Radio France Internationale

On April 26, 2000, crowds marched in downtown Minsk to mark the anniversary of the disaster.

The Chernobyl nuclear disaster continues to threaten the survival of the Belarusian people, says Vasily Nesterenko, former director of the Nuclear Energy Institute of the National Academy of Sciences of Belarus and currently head of the independent Institute of Radiation Safety (Belrad)

You maintain that the effects of the Chernobyl disaster have been played down not just by your own country's leaders but also by international organizations... 

The UN Scientific Committee on the Effects of Atomic Radiation (UNSCEAR) relies on the figures of the International Atomic Energy Agency (IAEA), which represents the nuclear lobby. In evaluating the disaster, the IAEA has compared Chernobyl to Hiroshima and Nagasaki. But in Japan, the thermo-nuclear reactions took place entirely in the air and the soil was not contaminated. After the Chernobyl fire, neighbouring countries were bombarded by hundreds of tonnes of radionuclides (or particles). The soil of Belarus alone absorbed two-thirds of the fall-out and some of the nuclides, such as caesium-137, stay radioactive for more than 30 years. Food accounts for 80 per cent of the long-term contamination of the population. Since the disaster, my institute has been systematically monitoring children with special spectrometers. My colleague, Prof. Yuri Bandazhevsky, was the first to link the accumulation of radioactivity in people's bodies to their illnesses. The contamination has caused many diseases not recognized by international organizations.

What are these ailments?

After doing thousands of autopsies, Bandazhevsky and his team showed that caesium-137 had accumulated in muscle tissue, beginning with the heart. Two-thirds of the 2,000 children monitored in the highly-contaminated area of Gomel have heart problems. The concentration of caesium in the kidneys has also caused serious malfunctions from an early age. Caesium in the eye muscles leads to cataracts. For example, a 1997 study in Svetlovisy, near Gomel, found that a quarter of children between 13 and 15 had cataracts.

During pregnancy, the placenta in mothers-to-be stores caesium which irradiates the foetus and after the birth, the mother breastfeeds the baby with contaminated milk. This leads to several diseases, such as "Chernobyl AIDS," which is an immunity disorder. The radioactive particles also combine with lead (which was used in 1986 to put out the fire and was then absorbed into the ground) to cause mental retardation and stomach ailments. We are heading towards a national disaster. 

What does your country need most?

Two million people, a quarter of them children, are living in contaminated areas. We have to set up mobile units to monitor these people and what they eat. My institute doesn't have many resources, so can only do very little monitoring. It's also threatened with closure because the government doesn't want the "disturbing" news to spread. The contaminated children need to be sent for a month's stay in clean areas at least twice a year and be given pectin-based pills, which are effective, very cheap and made in Ukraine, though not here. We have to set up centres for young mothers in areas where they can eat uncontaminated food while pregnant and breast-feeding.

Why hasn't your government raised the alarm about all this?

Belarus is facing alone a disaster it's not responsible for. Neither Russia nor Ukraine, where Chernobyl is located, has helped us. Our national budget only allows a small amount of money to be spent on the victims and our government officials believe they know best. But they haven't properly evaluated the situation. They've lied to tens of thousands of Russians who have come from "hot spots" or crisis areas in the former Soviet Union to live in the contaminated region. [1] They're still lying to their own people. They have a head-in-the-sand attitude. Only massive international aid and strong logistical support by the government will ensure the survival of my people in the long run.
 

1] After the collapse of the Soviet Union, 25 million Russians found themselves living outside the new borders of Russia, mainly in Central Asia and the Caucasus where there was and still is war. The Belarusian government encouraged them to settle in the contaminated areas by giving them housing, jobs and resident status.

Tchernobyl, on ferme... mais le débat reste ouvert 
http://www.unesco.org/courier/2000_10/fr/planet.htm

Fred Pearce, journaliste spécialiste de l’environnement, conseiller auprès de l’hebdomadaire anglais The New Scientist.

La première réserve écologique radioactive du monde

Dans les semaines qui ont suivi la catastrophe, les conifères et les mammifères friands de végétaux ont reçu les doses de radiations les plus élevées. Des arbres sont morts, de même que les vaches qui broutaient l’herbe hautement contaminée entourant la centrale. La plupart des souris de la zone interdite ont aussi disparu. 

Mais Mona Dreicer, une chercheuse américaine qui a participé à la conférence internationale de Vienne sur l’après-Tchernobyl en 1996, explique que le niveau de radioactivité à la surface du sol a été divisé par 100 dès l’automne 1986 et qu’ «en 1989, l’environnement avait commencé à récupérer». Les conifères abîmés produisaient à nouveau des pommes de pin et la population de rongeurs augmentait rapidement.

Aujourd’hui, la région abrite des sangliers, des élans, des cerfs, des renards et environ 200 loups. La liste des animaux qui ne sont pas revenus est assez courte. Il s’agit des pigeons et des rats, qui vivent des déchets produits par l’homme, et des hirondelles, qui auraient succombé à des problèmes génétiques.

Toutefois, la région reste contaminée, notamment ses sols, sa végétation et la couche de feuilles et de branchages qui tapisse ses forêts. La zone d’exclusion tracée autour de Tchernobyl est ainsi devenue la première «réserve radioactive» du monde. Nikolai Voronetsky, le directeur de la réserve, constate toutefois que très peu de scientifiques s’y aventurent. Ce qui n’a rien d’étonnant lorsqu’on sait que trois des dix botanistes qui y ont travaillé en 1986 sont décédés.

Quant à l’équipe de la réserve, elle a montré que les organes internes des loups et de la plupart des animaux sont toujours radioactifs.

La chercheuse de l’Institut de génétique et de cytologie de Minsk, Rosa Goncharova, a pour sa part détecté une augmentation des «anomalies génétiques» chez les rongeurs et les poissons. Mais Mona Dreicer relativise: «On a montré que la fréquence de ces problèmes était similaire dans des régions non contaminées […], ce qui permet de conclure qu’elles ne sont pas dues aux radiations». Certains scientifiques reconnaissent néanmoins dans ces déclarations une pirouette d’expert international. Ils rappellent qu’il est très difficile d’établir une stricte corrélation entre les anomalies génétiques et le niveau de contamination globale d’une zone. En effet, comme le souligne Mona Dreicer elle-même, des ruminants broutant dans des zones ayant subi peu de retombées radioactives directes peuvent être génétiquement atteints, notamment du fait de la migration de substances radioactives par les sols.

Ces substances peuvent s’infiltrer de maintes façons en dehors de la zone contaminée. Début 2000, on redoutait par exemple que les incendies de tourbière qui faisaient rage dans les zones contaminées libèrent des nuages de fumée radioactifs. Mais l’équipe envoyée sur place par l’ambassade américaine n’a semble-t-il rien pu prouver. En revanche, l’eau s’est avérée la principale menace écologique de l’après-Tchernobyl, comme le note un rapport de la Commission européenne. 

Après les inondations de printemps, les concentrations de substances nocives dans les cours d’eau sont parfois multipliées par quatre. La zone contaminée a été inondée six fois depuis la catastrophe. A chaque fois, des substances radioactives ont été emportées en aval, en particulier le long du Pripiat, un affluent du Dniepr qui termine sa course dans la mer Noire. Or, neuf millions d’Ukrainiens boivent de l’eau provenant de réservoirs artificiels construits sur le Dniepr; ils sont plus nombreux encore à consommer des produits agricoles cultivés grâce à ses eaux.

Quatorze ans après l’explosion, les substances radioactives continuent de circuler dans les sols et les écosystèmes, s’avérant beaucoup plus mobiles que les scientifiques ne l’avaient d’abord supposé. Jim Smith du Centre for Ecology and Hydrology, un organisme public anglais, a reconnu en mai 2000 que «l’environnement ne se débarrasse pas de la pollution aussi vite que nous l’avions pensé». A certains endroits, a-t-il précisé, le césium «se rediffuse à nouveau dans l’écosystème». Comme si l’héritage de Tchernobyl lançait un nouvel assaut.

 F.P.

Belarus: facing the disaster alone
The world's first radioactive reserve
Chernobyl: the political fall-out continues

Fred Pearce, environmental journalist and consultant for the British weekly magazine, The New Scientist

The world's first radioactive reserve

In the weeks after the accident, coniferous trees and mammals that ate ground vegetation received the highest doses of radiation. Trees died and were buried by the liquidators. Cows grazing heavily contaminated grass near the reactor died. So too did most of the mice in the exclusion zone. Most intriguingly for scientists, the survivors were almost all female. Only after four generations did male numbers begin to recover.

Mona Dreicer, a U.S. researcher who collated material for a major international conference held on the Chernobyl aftermath in 1996 (Vienna), says that levels of radioactivity in surface soils had fallen by a factor of a hundred by the autumn of 1986, and "by 1989 the natural environment had begun to recover." Badly damaged conifers were making cones again and the rodent population was growing fast.

Today, the roll call of wildlife includes wild boar, elk, deer, foxes and some 200 wolves. The list of animals failing to return is relatively short: pigeons and rats, which rely on human leftovers to flourish, as well as swallows, which have apparently fallen prey to genetic disorders. 

But the region remains heavily contaminated, particularly soils, vegetation, the tree wood and leaf litter on the forest floors that cover roughly a third of the exclusion zone. The zone has become, in effect, the world's first radioactive nature reserve. It is a fantastic laboratory to analyze the impact of radioactive fall-out. Yet says the head of the reserve, Nikolai Voronetsky, most researchers have avoided travelling there, fearing for their own personal safety. It is not surprising, perhaps. Three out of a team of ten botanists who visited in 1986 are now dead, he says.

Voronetsky's own researchers have shown that the internal organs of the wolves and most other creatures remain radioactive. The wolves are particularly worrisome as they stray outside of the reserve, hunting for sheep and horses. The boar tallied the highest geiger-counter readings, says Vorontesky, because they dig into contaminated soil in search of food. 

Rosa Goncharova of the Institute of Genetics and Cytology in Minsk says that she has observed increased "genetic anomalies" in rodents and fish in the contaminated zone. Dreicer downplays such reports. "The frequency of these reported defects was shown to be similar in highly contaminated and non-contaminated regions... Leading to the conclusion that they were not due to increased radiation dose," she says. But critics see this as UN "spin." For one thing, you would not expect a close correlation between defects and crude fall-out levels because, as Dreicer herself has pointed out, the vagaries of local soils can lead to grazing animals receiving high doses even in areas that had low fall-out. 

There are many ways that radioactivity can "leak into the wider environment." Earlier this year there were fears that fires raging across peat bogs in the contaminated zones could unleash radioactive clouds of smoke. The U.S. embassy sent a team to check for fall-out, but reportedly none was found. Water, however, has proven to be a serious conduit for contamination. 

During spring flooding, concentrations of radioactive materials in local rivers increases by up to four times. In fact, the contaminated zone had been flooded six times since the accident, each time washing radioactive material down river, especially along the banks of the Pripyat, which drains into the Dneiper and ultimately the Black Sea. With nine million Ukrainians drinking water from reservoirs on the Dneiper and many more eating food irrigated by the river waters, a European Commission report has concluded that radioactive water is the most important environmental threat still posed by the accident. 

Fourteen years after the disaster, radioactive materials are remaining mobile within soils and ecosystems much more than scientists had expected. Jim Smith of the British government's Centre for Ecology and Hydrology reported in May this year that "the environment is not cleaning itself of the pollution at the rate we previously thought." In places, he said caesium was being "re-released into the ecosystem" as the Chernobyl legacy begins a new cycle.

F.P.


 
Quelle a été l’ampleur réelle de la plus grande catastrophe nucléaire de l’Histoire? A quelques semaines de la fermeture totale de Tchernobyl, la polémique est loin d’être enterrée.

  Ouf! L’Europe ne cache pas son soulagement: les ingénieurs   s’activent à préparer la fermeture, prévue pour le 15 décembre 2000, de la très redoutée centrale nucléaire de Tchernobyl. Les autorités ukrainiennes peuvent enfin se féliciter d’avoir obtenu des bailleurs de fonds occidentaux les quelque deux milliards de dollars nécessaires afin de neutraliser et d’enterrer les réacteurs. Mais pour de nombreux citoyens ordinaires, le cauchemar continue.

Il y a quelques mois, le 26 avril, des milliers de personnes ont défilé dans des villes de Biélorussie, d’Ukraine et de Russie orientale pour commémorer le martyre des victimes de Tchernobyl. A 1h26 tapantes, les cloches se sont mises à sonner. A cette même heure, 14 ans plus tôt, l’un des réacteurs de la centrale avait explosé, libérant un gros nuage radioactif.

Au-delà du deuil, les marcheurs manifestaient leur peur. Peur des radiations qui sont toujours là, et qui menaceraient de semer des milliers de morts supplémentaires. Et peur de parler. La nuit du 26 avril 2000, Youri Bandajevski, recteur de l’Institut médical de Gomel (Biélorussie) jusqu’à son arrestation en 1999, se trouvait en exil intérieur à Minsk, capitale du pays. Il compte parmi les nombreux chercheurs clamant que leurs travaux sont censurés ou ignorés par les autorités.

Les estimations concernant le nombre de victimes de la catastrophe vont de 32, pour certains experts des Nations unies, à 15 000, selon des scientifiques ukrainiens. En juin, des chercheurs du Comité scientifique sur les effets des radiations nucléaires de l’ONU (UNSCEAR) estimaient que «rien ne prouve que les radiations aient eu un impact majeur sur la santé publique, en dehors du taux élevé de cancers de la thyroïde constaté chez les enfants, [dont] peu devraient mourir». Peu de temps avant, le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, avait pourtant déclaré: «La catastrophe est loin d’avoir cessé. Elle continue à produire des effets dévastateurs non seulement sur la santé des populations mais aussi sur tous les aspects de la vie sociale». Alors, qui dit vrai? Et d’où viennent ces énormes divergences?

L’accident de la centrale de Tchernobyl a transformé son réacteur n°4 en un chaudron infernal qui a craché un nuage radioactif pendant 10 jours. Ces radiations représentaient 100 fois celles émises par les bombes atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki cumulées. Passés plusieurs jours de silence absolu, les autorités ont procédé à l’évacuation précipitée de quelque 116 000 personnes après avoir défini une zone d’exclusion de 30 km autour de la centrale.

Il a fallu attendre des années avant que la population ne découvre qu’une région beaucoup plus vaste, s’étendant à 150 km de Tchernobyl jusqu’en Biélorussie et en Russie, avait subi d’importantes retombées radioactives. En 1989, on établit qu’un cinquième de la Biélorussie était contaminé; 400 000 habitants furent déplacées. Aujourd’hui, quatre millions de personnes vivent toujours dans des régions reconnues contaminées.

Le secret qu’ont gardé les gouvernements de la région sur l’étendue de la contamination continue à nuire à la santé publique, affirme Tobias Muenchmeyer, spécialiste de Tchernobyl pour l’ONG Greenpeace. Des chercheurs de différents pays partagent la même opinion. «La loi du secret a été décrétée dans notre pays dès les premières minutes de la catastrophe», estime Vladimir Tchernousenko, le scientifique ukrainien qui a coordonné les opérations de nettoyage.

Selon Tobias Muenchmeyer, ce black-out a contribué à ce que les Nations unies sous-évaluent gravement le nombre de victimes. Des personnalités critiques à l’égard du nucléaire, comme Rosalie Bertell, présidente de l’International Institute of Concern for Public Health (Institut international pour la santé publique) de Toronto, estiment que des considérations politiques ont également joué. Elles dénoncent l’accord de 1959 entre l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS), stipulant que «l’AIEA est chargée au premier chef d’encourager, d’aider et de coordonner les recherches sur l’énergie atomique ainsi que le développement et les applications pratiques de celle-ci». Pour résumer, selon Bertell, «l’AIEA se considère depuis cette date comme la sentinelle chargée de veiller sur l’information livrée au public concernant les effets sanitaires des radiations». Cette année, son institut et d’autres organisations ont demandé à l’OMS de réviser l’accord de 1959.

Les cancers sont la première cause d’inquiétude

L’iode et le césium sont les principaux isotopes radioactifs libérés dans l’atmosphère par le réacteur de Tchernobyl. L’iode 131 a une demi-vie ou période (temps nécessaire pour que la moitié des atomes d’un isotope radioactif se désintègre) de huit jours. Il a surtout été inhalé et ingéré dans des aliments. Quant au césium 137, il a une demi-vie d’environ 30 ans. Toujours présent dans les sols et la végétation, il continue à contaminer la population par le biais des produits alimentaires.

Qui a souffert de ces radiations? D’abord les «liquidateurs»: selon les estimations, 600 000 à 800 000 soldats et fonctionnaires ont été expédiés sur place juste après l’explosion pour neutraliser le réacteur et enterrer les déchets contaminés. Sur les 50 000 de ces «liquidateurs» qui ont travaillé sur le toit du réacteur, 237 ont été hospitalisés et 32 sont décédés.

Depuis, l’Union soviétique et ses héritiers n’ont pas su ou pas voulu suivre ce groupe à risques. Selon le Russe Leonid Ilyin, ancien membre de la Commission internationale de protection radiologique, «aucun de ces hommes n’a été enregistré nominalement. Ils n’ont pas fait l’objet de contrôles réguliers et sont rentrés chez eux». Cette «négligence» constitue sans doute la première cause de divergence sur le bilan de la catastrophe. En avril 2000, Viacheslav Grishin, président de la Ligue de Tchernobyl, une organisation basée à Kiev qui dit représenter les «liquidateurs», déclarait que depuis 1986, 15 000 d’entre eux étaient morts et 50 000 devenus invalides. Il s’appuyait sur une estimation controversée de Tchernousenko basée sur le taux de cancers lié aux quantités de radiations auxquelles le chercheur ukrainien supposait que les «liquidateurs» avaient été exposés.

Les cancers sont la première cause d’inquiétude. Dès 1991, les médecins signalaient de nombreux cas de cancers de la thyroïde chez les enfants de moins de quatre ans à l’époque du drame. En 1992, un groupe de chercheurs occidentaux, dont Keith Baverstock de l’OMS, admettait que Tchernobyl était probablement à l’origine de ces pathologies. Toutefois, les Nations unies ne l’ont officiellement reconnu qu’en 1995, après que 800 cas ont été recensés. Ce retard a eu de graves conséquences sur le dépistage et le traitement de la maladie, qui n’est pas fatale si elle est prise à ses débuts.

Plusieurs chercheurs de l’OMS sont sceptiques

Les réticences onusiennes s’expliquent en partie par les données sur Hiroshima et Nagasaki qui servent de référence, et laissaient présager un nombre de cas très inférieur. Mais des facteurs politiques ont aussi joué. «Si le danger a bien été sous-estimé ou minimisé, expliquait l’hebdomadaire britannique The Economist, le gouvernement américain risque de nouveaux procès sur tous les fronts, depuis les essais [nucléaires] dans le Nevada jusqu’à l’accident nucléaire de Three Mile Island en 1979».

Quoi qu’il en soit, 1 800 cas de cancer de la thyroïde attribués à Tchernobyl ont aujourd’hui été recensés. Dans les régions les plus contaminées, comme à Gomel, cette pathologie est 200 fois plus courante chez les enfants qu’en Europe de l’Ouest. Les prévisions sur le nombre de cas à venir vont de «quelques milliers», selon l’AIEA, à 66.000 pour les seuls enfants biélorusses âgés de moins de quatre ans en 1986, selon Elisabeth Cardis, une scientifique de l’OMS qui qualifie néanmoins cette estimation de «très incertaine».

Qu’en est-il d’autres cancers qui se développent beaucoup plus lentement? Officiellement, l’OMS s’en tient à sa position de 1996: «si des rapports font état d’une augmentation de l’incidence de certaines pathologies malignes [...], ils manquent de cohérence et pourraient ne refléter que des différences méthodologiques dans le suivi des populations». Mais plusieurs chercheurs de l’OMS sont sceptiques.

A partir des données sur Hiroshima et Nagasaki, Baverstock pronostique un «excès» de 6 600 cancers mortels, dont 470 leucémies. Pire, une équipe de médecins biélorusses annonce qu’elle a découvert des taux de leucémie quatre fois supérieurs à la moyenne nationale au sein des liquidateurs les plus exposés. Et certains craignent que, comme dans le cas du cancer de la thyroïde, la réalité ne dépasse largement les prévisions.

Les incertitudes scientifiques ne doivent pas masquer les considérations politiques, affirme Tobias Muenchmeyer: les gouvernements, qui filtrent la plupart des statistiques dont se servent les Nations unies, ont leurs objectifs propres. L’Ukraine dispose de 14 réacteurs nucléaires et en construit quatre autres, selon l’AIEA. D’un côté, le pays «ne veut pas nuire à son image de puissance nucléaire, explique-t-il, mais de l’autre, il a intérêt à faire état de ses difficultés pour obtenir de l’aide. C’est pourquoi les autorités se contredisent parfois à quelques jours de distance».

Quant aux responsables biélorusses, ils ont invariablement minimisé la catastrophe, bien que le pays ait reçu 70% des retombées radioactives. «Ils partent du principe qu’ils ne peuvent pas résoudre le problème car les zones et le nombre de gens contaminés sont trop importants, et le gouvernement trop pauvre. Ils ont décidé de faire taire toutes les voix dissidentes», estime Muenchmeyer. Cette attitude a entravé la recherche et, semble-t-il, empêché les études des chercheurs biélorusses de parvenir jusqu’aux Nations unies. 

Il y a deux ans, Rosa Goncharova, de l’Institut de génétique et de cytologie de Minsk, a indiqué dans une communication que depuis 1985, les bébés nés avec des becs-de-lièvre, des trisomies et d’autres anomalies avaient augmenté de 83% dans les zones les plus contaminées, de 30% dans les zones modérément contaminées et de 24% dans les zones dites «propres». 

De vastes zones de Biélorussie restent lourdement contaminées Questionnée pour les besoins de la présente enquête, Elizabeth Cardis de l’OMS a affirmé «ne pas avoir reçu copie de ce document». Elle n’avait pas non plus eu les travaux du Biélorusse Vassili Nesterenko, directeur du Belrad, un institut indépendant de radioprotection (voir interview p. 14). 

Rappelons également le sort de Youri Bandajevski, aujourd’hui entre les mains d’Amnesty International. Lorsqu’il était encore recteur de l’Institut médical de Gomel, il avait pratiqué des autopsies sur des cadavres de gens dont le décès, prétendait-on, n’était pas lié à Tchernobyl. En comparant leurs organes avec ceux de rats nourris de céréales contenant du césium radioactif, il avait fait une troublante découverte: «les altérations pathologiques des reins, du cœur, du foie et des poumons étaient identiques à celles constatées chez les cobayes». Conclusion, le césium avait bien rendu ces gens malades et provoqué leur mort.

Les publications du chercheur se sont heurtées à un mur de silence. Puis après avoir critiqué la façon dont le ministère de la Santé avait mené les recherches sur l’après-Tchernobyl, il s’est vu arrêté à l’été 1999 sous un vague chef d’inculpation de corruption, et emprisonné pendant six mois. Son ordinateur et ses dossiers ont été confisqués et il est toujours assigné à résidence à Minsk. 

Tandis que de vastes zones de Biélorussie demeurent lourdement contaminées, l’OMS admet que «certains aliments produits par le secteur privé dépassent [les normes en matière de radioactivité]». En revanche, grâce à un labourage en profondeur et aux engrais, «les aliments produits par les fermes collectives ne dépassent pas les normes». 

Mais dans un contexte économique difficile, des milliers de gens dépendent justement des petites productions privées, affirme Vassili Nesterenko. Pour lui, un quart des cultures issues des zones contaminées dépassent les normes et que plus de 500 villages boivent du lait contaminé. Enfin, rappelle Keith Baverstock de l’OMS, de nombreuses personnes pratiquent la cueillette de champignons et de baies sauvages ou la chasse, alors que le gibier est l’aliment le plus dangereux.

Il y a bien sûr aussi ceux qui retournent vivre dans le périmètre interdit, pour la plupart des vieilles femmes qui jugent qu’à leur âge, la radioactivité ne peut plus leur faire de mal. Mais un bébé serait également né dans la zone récemment, selon des sources non confirmées. Comme le disait Kofi Annan, la tragédie continue.

Just how bad was the world's worst nuclear disaster? The answer lies hidden within a web of politics and scientific uncertainty enmeshing the UN and eastern European governments

A sigh of relief ripples across Europe as engineers prepare to shut down Chernobyl, the world's most feared nuclear power plant, on December 15th. Politicians have finally brokered a deal in which Western donors foot the bill of about two billion dollars to close and fully entomb the Ukrainian reactors. Yet for many ordinary citizens, the nightmare continues. 

Just a few months ago, on April 26th, thousands marched solemnly through the towns of Belarus, Ukraine and eastern Russia to commemorate the dead from the nuclear disaster 14 years before. At 1:26 am bells tolled to mark the moment when a Chernobyl reactor blew and a deadly radioactive fall-out began to blanket their fields and towns.

But as well as mourning, there was fear. Fear of the continuing radiation, which could claim thousands more. And fear of speaking out of turn. That night, Yuri Bandazhevsky, rector of the Gomel Medical Institute in Belarus until his arrest last year, was in forced internal exile in the capital of Minsk. He is one of many researchers who say their work has been suppressed or ignored by governments anxious to play down the radiation risks their citizens still face.

Estimates of the death toll to date range from the 32 offered by UN nuclear scientists to the 15,000 suggested by some Ukrainian researchers. In June, scientists at the UN's Scientific Committee on the Effects of Atomic Radiation (unscear) reported that "there is no evidence of a major public health impact attributable to radiation, apart from a high level of thyroid cancer in children [from which] few should die." Yet the previous day the UN Secretary-General, Kofi Annan, appeared to disagree when he said: "The catastrophe is far from over. It continues to have a devastating effect not only on the health of the people, but on every aspect of society." So what is the truth? And how do these disparities arise?

The accident at the Chernobyl nuclear power plant reduced the Number Four reactor to an inferno spewing out a radioactive cloud for ten days. It released a hundred times more radioactivity than the atomic bombs at Hiroshima and Nagasaki combined. For several days there was total silence, before the panic evacuation of some 116,000 people from an exclusion zone that stretched up to 30 kilometres from the plant. 

Only years after the accident did the public learn that a larger zone some 150 kilometres away near the Belarus town of Gomel and extending into Russia suffered heavy fall-out in rain shortly after the accident. It emerged in 1989 that a fifth of Belarus had been significantly contaminated. Some 400,000 people were resettled. And today around four million people still live in areas with some acknowledged contamination. 

Official secrecy inside the Soviet Union and its successor governments about the extent of the contamination continues to bedevil the task of keeping people safe, says Greenpeace's Chernobyl specialist Tobias Muenchmeyer. Researchers inside the affected countries agree. "A regime of secrecy was accepted in our country from the very first second the catastrophe happened," says Vladimir Chernousenko, the Ukrainian scientist who co-ordinated the post-accident clean-up. 
 

A partial information blackout by governments, combined with scientific caution, has helped lead UN agencies into seriously underestimating the death toll, Muenchmeyer believes. Critics of the nuclear industry such as Rosalie Bertell, president of the International Institute of Concern for Public Health in Toronto, say there is another political reason. They point to a 1959 agreement between the International Atomic Energy Agency and the World Health Organization, which said that "the IAEA had the primary responsibility for encouraging, assisting and co-ordinating research on, and the development and practical application of atomic energy." According to Bertell, "the IAEA has since considered itself to be the watchdog over information about radiation health effects which is distributed to the public." Bertell and other organizations this year called for the who to amend the agreement.

The most important radioactive isotopes released at Chernobyl were iodine and caesium. Iodine-131 has a half-life (the time it takes for half the atoms of a radioactive isotope to decay) of eight days. It was mostly inhaled and eaten in contaminated food. Caesium-137 has a half-life of some 30 years. It is still present in soils and vegetation and continues to contaminate people through foodstuff. Some lesser isotopes have half-lives of hundreds or even thousands of years.

Controversy over the casualty list

Who suffered? In the front line were the "liquidators"Ðthe estimated 600,000 to 800,000 soldiers and public employees drafted in to make the reactor safe and bury contaminated waste. Some 50,000 of them worked on top of the reactor. "They were supposed to stay on the roof to fight the fire for only 90 seconds, then be replaced. One can easily guess this did not happen," says Jean-Pierre Revel, senior health official at the International Federation of the Red Cross. As a result, 237 liquidators were hospitalized; 32 died. 

But since then, the Soviet Union and its successors have been unable or unwilling to keep track of this most-at-risk group. According to Leonid Ilyin, a former Russian member of the International Commission on Radiological Protection, "none of these men was registered by name. None was checked [for subsequent health] on a regular basis. They all went back to their homes." This failure is probably the largest organizational cause of the disputes over Chernobyl's death toll. Last April, Viacheslav Grishin, president of the Chernobyl League - a Kiev-based organization that claims to represent the liquidators - said 15,000 liquidators had died and 50,000 were handicapped. His source was a controversial estimate by Chernousenko, based on likely cancer rates from radiation doses that he believes the liquidators received. 

Cancers have been the biggest long-term medical fear. By 1991, doctors were reporting many cases of thyroid cancer among children under four at the time of the disaster. In 1992, a group of Western researchers, including Keith Baverstock of the who, agreed that Chernobyl was the likely cause. Yet it was only in 1995, after some 800 cases had emerged, that the UN system formally accepted the finding. This delay had serious implications in finding and treating the disease, which is not fatal if caught early enough.

Playing politics and crushing dissent

The conclusion had been initially controversial partly because the evidence from Hiroshima and Nagasaki suggested that there should be far fewer cases. But politics also entered the equation. The Economist magazine speculated that "if the health risks have been underestimated or understated, the American government could face new lawsuits on everything from the Nevada [nuclear] tests to the Three Mile Island nuclear accident in 1979."

At any rate, there are now some 1,800 recorded cases of thyroid cancer attributed to Chernobyl. In the most contaminated districts, such as Gomel, childhood rates are 200 times those in western Europe. Estimates of the total number of cases expected to arise in the future range from a "few thousand," suggested by the IAEA, to the 66,000 predicted for a single group - Belarusian children under four at the time of the disaster - by who scientist Elisabeth Cardis, who stressed that "the risk estimates are very uncertain." 

What about other cancers which take longer to develop? Officially, the who stands by its assessment of 1996 that while "there have been some reports of increases in the incidence of specific malignancies in some populations living in contaminated territories and in liquidators, these reports are not consistent and could reflect differences in the follow-up of exposed populations." But some of its scientists are sceptical. They ask not what can be proved, but what can be expected on the basis of known science.

Based on Hiroshima and Nagasaki, Baverstock expects an "excess" of some 6,600 fatal cancers, including 470 leukaemia cases. But a team of Belarusian doctors claims to have found leukaemia rates four times the national average among heavily exposed liquidators. And there are fears that, as with thyroid cancer, rates could be far higher than expected. 

But scientific uncertainty should not detract from the fact that there are political reasons why the truth about the disaster may remain hidden, says Muenchmeyer of Greenpeace. National governments, who act as gatekeepers for most of the statistics reaching UN agencies, have a political agenda, he says. The Ukraine is running 14 nuclear reactors with another four under construction, according to the IAEA. "So the Ukraine doesn't want to ruin the image of nuclear power by stressing the harm done by Chernobyl," says Muenchmeyer, "but they also want aid for health programmes. So then they are interested in showing the burden. Often they contradict themselves within a few days."

The Belarus government has consistently downplayed the disaster, even though the country received an estimated 70 per cent of the fall-out. "They decided that the territory and the number of people affected are so great, and the government so poor, that they cannot solve the problem. They decided to shut down dissent," says Muenchmeyer. This has hampered research and apparently prevented findings by local scientists from reaching UN agencies.

Two years ago, Rosa Goncharova of the Institute of Genetics and Cytology in Minsk reported evidence that congenital abnormalities were turning up in the children of those irradiated by Chernobyl. She told a conference that since 1985, cases of cleft palate, Down's syndrome and other deformities had increased by 83 per cent in the areas most heavily contaminated, 30 per cent in moderately contaminated areas and 24 per cent in "clean" areas. 

But two years later, when contacted for this article, Cardis of the WHO said she had "not received copies of the paper" by Goncharova. Nor had she received copies of work by the director of the independent Belarusian Institute of Radiation Safety (Belrad), Vasily Nesterenko. He had found that in the most contaminated areas, the incidence of diseases of the circulatory system had risen fourfold and deaths among children from respiratory diseases were up 14-fold (see interview).

The dangers of the twilight zone

And consider the fate of Yuri Bandazhevsky, whose case has been taken up by Amnesty International. As rector of the Gomel Medical Institute, he carried out autopsies at the city's forensic morgue, on bodies whose deaths were not considered connected to Chernobyl. He examined their internal organs and compared them to the organs of rats that he had fed grain containing radioactive caesium. He was shocked by his findings: "The pathological modifications of the kidneys, heart, liver and lungs was identical to those among the experimental rats." From this he concluded, "that accumulation of radiocaesium in the organs played a major role in the triggering of pathological responses." In other words, it made them ill and even killed them.

His paper went ignored. His subsequent criticism of the post-Chernobyl research conducted by the Ministry of Health brought him more enemies. And last summer he was arrested on unspecified bribery charges, and locked up for six months. His computer and all his files were confiscated and he remains confined to Minsk "under investigation." 

People are still being exposed to radiation from Chernobyl. In large areas of Belarus in particular the environment is still heavily contaminated. The who says "some foods produced by private farmers do exceed [who limits]." But it points out that most large farms minimize take-up of radioactivity in soils by deep ploughing and applying fertilizers. "No food produced by collective farms now exceeds the limits." 

But thousands of people rely on private farms, according to Belrad's Nesterenko, who maintains that a quarter of the food grown inside the contaminated zone supersedes official radioactivity limits. More than 500 villages are drinking contaminated milk. Moreover, many people rely on "wild" produce such as mushrooms, berries and hunted meat - the most risky food of all says the who's Baverstock.

And, of course, there are the people who return to live a twilight life inside the exclusion zone, replanting their contaminated gardens, gathering food from the forests and raiding abandoned food stores. Most are old women, who judged that the radioactivity could do them little harm at their age. But there are recent unconfirmed reports of a baby being born there. The tragedy, as Kofi Annan said, goes on.