Francia: l'Assemblea vuole una missione informativa (15 giugno)

Le Monde
Une mission d'information sur le « syndrome de la guerre du Golfe » envisagée à l'Assemblée
Des militaires s'affirmant victimes de troubles fondent une association

Des témoignages de militaires français ayant participé à la guerre du Golfe, en 1991, font état de symptômes comparables à ceux décrits par des dizaines de milliers de vétérans de l'armée américaine. Ils ont été rendus publics, mercredi 14 juin, à l'Assemblée nationale, après l'audition des intéressés par la députée Michèle Rivasi. Une « association des victimes du Golfe » (Avigolfe) vient d'être lancée.

Mis à jour le jeudi 15 juin 2000

CAS APRÈS CAS, le dossier du « syndrome de la guerre du Golfe » prend progressivement sa place dans le débat public français. Mercredi 14 juin à l'Assemblée nationale, des témoignages d'anciens militaires de l'« opération Daguet » ont été rendus publics, à l'occasion de leur audition par la députée (apparentée PS) Michèle Rivasi. L'élue de la Drôme en a profité pour demander au groupe socialiste la création d'une mission d'information parlementaire en vue de l' « évaluation exacte des risques sur le terrain et de l'état de santé des victimes civiles ou militaires pendant la guerre ». Présents à ses côtés, une poignée d'anciens engagés français dans le conflit de 1991 contre l'Irak ont annoncé la création d'une Association des victimes du Golfe (Avigolfe), en faisant état d'une trentaine de cas individuels.

De nouveaux témoignages de personnes s'affirmant « malades de la guerre du Golfe » sont venus s'ajouter à celui du caporal Hervé Desplat, frappé par une incapacité pulmonaire à 60 % après le retour d'Irak de son unité, le 68e régiment d'artillerie ( Le Monde du 7 juin). Au moment du conflit, Bernard Vendomme était, lui, brigadier-chef au 6e régiment de commandement et de soutien. Depuis 1993, il souffre de douleurs musculaires, de difficultés respiratoires, de maux de tête et de problèmes auditifs. Comme M. Desplat, il a décrit une opération de destruction systématique d'un camp français dans les sables du désert, quand « un bulldozer du génie de la Légion a enfoui les tentes, les matériels et les groupes électrogènes ».

  PAS DE PENSION MILITAIRE

Parlant au nom de son fils Yannick, aujourd'hui à l'hôpital militaire du Val-de-Grâce, Paulette Morvan a réagi au témoignage de M. Vendomme en affirmant « reconnaître les mêmes symptômes que ceux dont Yannick est atteint ». Hospitalisé pour troubles neurologiques, ayant déclenché une embollie pulmonaire en 1996, l'ancien légionnaire du 2e régiment étranger d'infanterie a, comme les autres témoins, vu rejeter sa demande de pension militaire : « Il n'a pas fait le recours dans les temps, parce qu'il était alors à l'hôpital », a expliqué Mme Morvan. Indiquant avoir reçu des courriers d'une trentaine de militaires, les promoteurs de l'association Avigolfe ont encore cité le nom d' « un technicien d'aviation », Gérard Jourdrein, aujourd'hui en congé-maladie pour un cancer, qui était intervenu sur les avions ayant participé aux bombardements. Avigolfe entend désormais « faire toute la vérité et défendre les victimes militaires et civiles pour la reconnaissance de leurs droits à l'information, à l'indemnisation et aux soins ».

« L'état de santé des soldats n'a pas été reconnu à ce jour par les autorités militaires », a commenté Mme Rivasi, en souhaitant qu'une commission scientifique d'experts français indépendants soit mandatée pour étudier les données disponibles .« Les commissions de réforme ont systématiquement rejeté les dossiers de demande de pension », a-t-elle ajouté. Son initiative n'est d'ailleurs pas isolée. Le 14 décembre, le sénateur (PS) de la Creuse, Michel Moreigne, avait posé une question écrite au secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Citant l'utilisation d' « antidotes » (à base notamment de pyridostigmine) administrés aux soldats américains pour les protéger des attaques chimiques irakiennes, le sénateur faisait état des troubles (lésions neuronales, vulnérabilité génétique) détectés chez les vétérans de l'armée américaine. Aussi M. Moreigne a-t-il demandé « si le produit précité, ou des équivalents, sont susceptibles d'être administrés aux soldats français et à la population ». Non sans interroger sur l'éventuelle compétence de l'Agence française de sécurité sanitaire « pour autoriser l'emploi des molécules, médicaments ou antidotes, administrés ou stockés par l'armée française et ses services de santé dans le cadre des dispositifs de protection NBC [nucléaire, bactériologique, chimique]  ». A ce jour, le sénateur n'a pas reçu de réponse.

Erich Inciyan

Le Monde daté du vendredi 16 juin 2000